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Le capitalisme à un tournant
Réfractions N°18 2007

Si tu veux sauver un arbre, mange un castor !

Hong Kong pue. Voilà l’information que l’on peut tirer de la dernière offensive publicitaire de Singapour visant à détrôner l’île chinoise comme place financière mondiale1.

Hong Kong pue. Les vents qui soufflent du continent amènent les miasmes produits par le développement effréné de la province limitrophe du Guangdong jusqu’aux fenêtres closes de l’ancienne propriété britannique. La rivière des Perles qui fournit l’île en eau potable est devenue un cloaque à ciel ouvert.

Hong Kong pue ! Ce message écologiste à destination des banquiers contient toutes les mises en garde murmurées, prônées, criées par les écologistes ces trente dernières années. La prise en compte de ces données par les financiers de cette île va faire la fortune d’une autre île, Singapour, où depuis longtemps déjà, jeter une cigarette ou un chewing-gum par terre est considéré comme un délit.

La question environnementale ne fait plus peur au capitalisme, au contraire ! Le travail de vulgarisation fait par ceux qui avaient conscience de la détérioration de la planète a porté ses fruits, aidé en cela par les événements climatiques. La prise de conscience de la dégradation irrémédiable du monde qui nous entoure est présente aujourd’hui dans tous les milieux. Dans les entreprises comme dans les structures étatiques, on assiste à un virage stratégique.

Le tournant

La question environnementale amenant les financiers à fuir leur château fort, on peut se demander s’il y a là plus qu’un simple souci de santé. S’il fallait définir simplement la situation économique de notre planète, nous pourrions dire que nous sommes face à deux tendances convergentes, la recherche d’un abaissement permanent des coûts d’un côté et, de l’autre, une augmentation tout aussi permanente des profits. Que cela ait pour conséquence la misère du monde, tant matérielle que psychologique, est absolument secondaire. Le premier point a été rendu possible par l’incroyable développement des outils robots, qui ont fait passer aux oubliettes tout ce qui relevait du savoir traditionnel, du « tour de main ».

Les « processus de production » se sont tellement simplifiés, du point de vue de l’implication humaine, qu’une formation professionnelle passe-partout est suffisante pour faire fonctionner les lignes d’assemblage. Les conditions nécessaires à une délocalisation de la production sont ainsi remplies. Dans le domaine financier, on assiste à un jeu de « chaises musicales » par le biais des LBO2. Des fonds de pension achètent à crédit des entreprises, utilisant leur production pour financer la dette bancaire puis revendre ces entreprises avec un bénéfice sans jamais avoir investi un kopeck directement3. Selon le Monde du 28 novembre 2006, on trouve parmi ces joueurs de monopoly financier les trois plus grands groupes mondiaux, Blackstone, Carlyle4, et Goldmann. À eux trois, ils gèrent pour plus de 100 milliards de dollars de LBO5. De cette façon, les seuils de rentabilité avoisinent, selon les sources, entre 25 et 15 pour cent du chiffre d’affaires.

Cette double pression sur les pays anciennement industrialisés produit de façon irréversible des transferts du tissu industriel traditionnel6 vers des pays à toujours plus faible coût de maind’oeuvre7. Que reste-t-il dans nos vieux pays ? Un système étatique, au sens large du terme8, une main-d’oeuvre cassée, désorganisée, et une prise de conscience amère. Les rescapés qui sont encore employés savent bien qu’ils viennent d’échapper à leur disparition économique totale et qu’ils sont devant un champ de ruines, autant au niveau de leurs espérances propres qu’en ce qui concerne celles de leurs enfants.

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